Les outils techniques et créatifs

Pour commencer, j’ai privilégié les logiciels compatibles Mac/Windows.

(j’aurais pu inclure Linux dans ce critère, étant personnellement interessé par cette plate-forme, surtout Ubuntu, mais elle est encore confidentielle et des logiciels incontournables pour les auteurs, comme Final Draft, n’y existent pas encore).
Pour commencer, le logiciel parfait n’existe pas, et de loin.
Le principe même de la carte mentale est de refléter au plus près notre façon de penser, ce qui est à la base un concept abstrait. On ne pourra non seulement jamais représenter exactement notre façon de penser, mais de plus, chacun a la sienne.
Moi, par exemple, quand je réfléchis à un projet, je suis à l’aise avec le format horloge : chaque chiffre sur le cadran représente non plus une heure, mais une étape du projet, et ainsi d’un coup d’oeil (un peu comme sur un graphique en forme de camembert dans un tableur) je vois si j’en suis au quart, à la moitié, ou bientôt à la fin. (je ne suis pas le seul, les scénaristes de « Mission: Impossible III », Alex Kurtzman et Roberto Orci, en parlaient sur « the Screenwriter’s podcast »). Aucun logiciel ne propose cela pour l’instant. Ils proposent pour la plupart une vue « en étoile » ou « radiale », mais celle-ci ne suit pas réellement un cercle et ne saurait donc remplir cette fonction.
A un autre stade du développement, j’ai besoin de passer par le format « timeline », qu’utilisent les logiciels de montage vidéo ou audio (on appelle aussi ces derniers « séquenceurs », et c’est une appellation qui, pour un auteur, prend tout son sens).
Des lignes horizontales de différentes couleurs représentent les intrigues et/ou les personnages, depuis le début jusqu’à la fin. Pour des projets autres que l’écriture, on retrouve aussi la timeline dans les logiciels de gestion de projets, comme Gantt Project ou MS Project. Je déplore n’avoir pas encore réussi à m’en servir en développement.
Ces deux cas, l’horloge et la timeline, ne sont que des exemples, il en existe bien d’autres, ceux-là me sont simplement parlants. A ma connaissance, aucun logiciel à l’heure actuelle ne permet de présenter une carte visuelle de l’une de ces deux façons, et encore moins de pouvoir basculer en un clic de l’une à l’autre. Sur un tableur, on peut basculer ainsi d’un camembert à un histogramme instantanément : je rêve qu’un jour quelqu’un le fasse, je serais prêt à payer cher pour ce logiciel. (Ou, mieux encore, à payer quelqu’un pour le faire et ainsi gagner de l’argent en vendant mon propre outil).
A l’heure actuelle, un logiciel selon moi se détache des autres : XMind.
D’autres existent, et tout à fait intéressants, on les verra plus loin, mais celui-là offre 3 avantages décisifs :
-il est gratuit dans sa version de base —et suffisante pour 90% des gens.
-il est compatible toutes plateformes Mac/PC/Linux (et même iPad, via le logiciel « iThoughts HD »)
-il offre plusieurs modes de visualisation, qui, sans être parfaits, sont efficaces.
Il y a ensuite d’autres logiciels Open Source, gratuits, comme FreePlane (anciennement FreeMind), mais assez moches… En même temps, c’est gratuit, donc critique interdite.
On trouve facilement des ressources (des modèles de cartes par exemple) pour ces logiciels, qui sont compatibles entre eux : FreePlane est un standard :
J’ai longtemps été adepte et même partenaire de NovaMind, qui était le plus prometteur, mais ils ont abandonné leur version « screenwriter », qui intégrait un mini FinalDraft dans le soft, et permettait ainsi d’y écrire jusqu’aux dialogues. Hélas, la version ne supportait pas le français, et c’est désormais du passé. Cela reste un bon logiciel de MindMapping, mais payant, et du coup, moins intéressant que XMind, à l’heure actuelle.
A noter que XMind propose une version payante qui offre plus d’options d’export (notamment vers Word ou traitement de texte compatible), mais la version gratuite permet, via une astuce que je publierai prochainement, de pallier cette limite.
Pour autant, puisqu’il s’agit ici d’aider chacun à trouver chaussure à son pied, je ne peux que conseiller des logiciels de conception de diagrammes, qui par certains aspects se rapprochent beaucoup de l’usage qu’on peut faire des cartes mentales. Pour un auteur, cela est intéressant pour visualiser des liens de cause à effet, ou des réseaux de relations interpersonnelles, qui, fort poétiquement, peuvent s’apparenter à des circuits électroniques…
Un des plus répandus est VUE :
suivi de yEd
Si cela intéresse du monde, je publierai par la suite des précisions sur ce domaine.

Cannes, censuré

La censure ne s’applique pas à des faits ou comportements répréhensibles qui auraient eu lieu à Cannes (on peut s’en réjouir ou le déplorer, selon la tournure d’esprit) mais plutôt —et c’est une bonne nouvelle— en raison de l’extrême intérêt des rendez-vous professionnels qui y ont eu lieu. Un des projets U.S. en développement entre, après un an et demi d’efforts, dans une phase supérieure. Cela peut ne rien donner, mais cela peut aussi marcher. D’autres projets sont en attente de financement et d’autres encore en écriture : tous sont soumis au secret. Les messages sur cette page risquent de devenir absurdes : « il se prépare des choses, mais nous ne pouvons rien vous dire », c’est un obstacle à la communication…

« LE CONCERT » reste parmi les plus gros succès français dans le monde

Unifrance (organisme de promotion du cinéma français dans le monde) évoque dans son dernier rapport les plus gros succès français dans le monde : 2011 n’a pas fait mieux que 2010, et le Concert reste dans le top 3 des films français ayant remporté le plus grand succès mondial, avec 2,3 millions de spectateurs dans le monde, ce qui le porte à 4,13 millions au total. C’était mon premier scénario, et cela fait maintenant 12 ans. Depuis, une autre dépêche dans la presse a retenu mon attention, et je ressens la même chose qu’en août 2000, en lisant ces quelques lignes évoquant cet orchestre russe…

3e film à franchir la barre des 1,25 millions au Box-Office

Après LE CONCERT et INCOGNITO, BIENVENUE A BORD est mon 3e long-métrage comme auteur à dépasser les 1,2 millions d’entrées au box-office, puisqu’il arrive à 1,42 millions. Si Bienvenue à Bord était pensé et voulu comme une comédie très grand public, Incognito et surtout le Concert furent de grosses surprises, avec respectivement 1,26 millions et 4,13 millions de spectateurs dans le monde.

Je suis en tout cas toujours plus certain de mon plaisir à faire du cinéma populaire, avec toute l’exigence possible : cela ne semble contradictoire qu’à ceux qui n’ont jamais écrit un film de leur vie : les films les plus difficiles à écrire sont souvent les plus boudés par la critique, ou considérés comme « faciles »…

Made in Patagonia & Atacama

Eric Lavaine et moi avons poursuivi notre travail sur notre 5e film chez moi, entre l’extrême sud de la planète (Détroit de Magellan et Terre de Feu) et les déserts de l’altiplano (Atacama est le désert le plus sec du monde, à la frontière avec la Bolivie et l’Argentine). Nous avons donc écrit dans une oasis altiplanique et la douceur du printemps chilien : il faut bien que le métier d’auteur ait des bons côtés. Le film, une « comédie dramatique mais comédie quand même », ne ressemblera à rien de ce que nous avons fait jusqu’à présent, et parlera de l’amitié, des derniers grands changements, et d’une bande de potes qui se redécouvre.  

« LE CONCERT » : 2e PLUS GROS SUCCES EN FRANCAIS DANS LE MONDE

Avec 16 millions d’euros de recettes dans le monde (soit 2,5 millions d’entrées), le film arrive juste derrière « Adèle Blanc-Sec » (*). Son succès a battu des records pour le cinéma français dans plusieurs pays, dont le Japon et Israël (2e plus gros succès depuis 5 ans)

Histoire Originale : Héctor Cabello Reyes

Collaboration à l’écriture : Thierry Degrandi
Adaptation et dialogues : Matthew Robbins, Radu Mihaileanu et Alain-Michel Blanc
Réalisation : Radu Mihaileanu
Production déléguée : Productions du Trésor
Distribution : EuropaCorp
Ventes Internationales : Wild Bunch

(*) Ce classement prend en compte les films en langue française et non les productions françaises en anglais (comme « Ghost Writer » ou « Sans Identité »)

Nomination aux Golden Globes pour LE CONCERT

Après les César et le Prix Louis Lumière, voici les Golden Globes qui nominent cette histoire incongrue et pourtant vraie que j’ai eu la chance d’écrire il y a maintenant plus de 10 ans, en août 2000. Le sous-marin Koursk disparaissait, j’étais seul dans ma vie, et je ne savais pas que celle-ci allait changer…

4 millions de spectateurs pour LE CONCERT dans le monde



Le film continue sa carrière dans le monde, 1 an après sa sortie en France. Pour ce petit film créé sur le coin d’une table dans un bureau, où je griffonnais et où j’ai vu dans un entrefilet du « Monde » une dépêche AFP de quelques lignes, l’histoire se poursuit jusque dans les coins les plus reculés de la planète, avec des surprises : la Nouvelle Zélande a autant vu le film que les Etats-Unis, ce qui est beaucoup pour l’une et très peu pour l’autre…

La direction d’écriture : un réel changement

Pour cette rentrée 2010, j’ai le plaisir d’accepter de diriger l’écriture de plusieurs films dont on m’a confié le développement, dans cette fonction si peu courante en France, qu’on appelle « directeur d’écriture », et qui n’est pas du tout la même que le directeur du développement. De quoi s’agit-il ? Je ne vois pas de meilleur parallèle que celui de l’architecte, qui ne taille pas la pierre des parois ni ne coupe le bois des structures, mais définit le travail et en est le responsable. Si on voit l’écriture comme le miroir du tournage, le directeur d’écriture en est le metteur en scène. Il donne la direction, il apporte le premier matériau créatif, il donne tous les axes et le concept, le style et les limites. Il fait le crayonné, l’esquisse du projet. Avec l’aide des auteurs, il affine, rectifie et enrichit le matériau. Il élabore avec eux l’histoire. Puis, avec son aide, ses conseils et/ou ses directives, les auteurs avancent dans le développement du traitement, puis du séquencier, et enfin des dialogues. Le directeur du développement, lorsqu’il existe, représente le producteur, comme je représente les auteurs. Il est l’interlocuteur du directeur d’écriture.
Actuellement, deux cas de figure se présentent : dans le premier (une comédie sur le couple), les auteurs ont apporté un sujet au producteur, et on m’a demandé d’en assurer la direction d’écriture, d’accompagner et aider les auteurs (dont c’était le premier scénario) à écrire leur histoire. Pour cette activité, ma participation seule est nécessaire. Dans le cas d’un autre projet, on m’a laissé liberté de constituer ma propre équipe : le Studio « Ça Va Faire Des Histoires Développement » a été créé spécifiquement pour pouvoir répondre à ce cas de figure, et ce sont des auteurs que j’ai recrutés qui développent le projet que j’ai défini.
C’est un profond changement dans les habitudes et la culture d’écriture françaises, qui m’est sans doute naturel, du fait de mes origines variées : le modèle de l’atelier d’écriture et de la création collective m’est plus qu’un autre familier, pour deux raisons : la première est que je n’ai jamais fait d’anti-américanisme, même sournois et caché, comme j’en rencontre très souvent en Europe. La seconde, plus profonde, est que ma première passion fut et reste le théâtre, où le Théâtre du Soleil, Peter Brook et la création collective qu’ils représentent depuis des années fut mon premier choc artistique. J’y ai consacré toute mon énergie entre 20 et 30 ans, et c’est peut-être pour ça que la dimension solitaire de l’auteur ne m’est pas absolument nécessaire : je la crois en grande partie héritée d’une tradition non-dite, qui associe au fond tout auteur à un Balzac, au sens de solitaire et littéraire (comme beaucoup de choses en France, où on hérite de choses non dites, comme dans les secrets de famille : la République française, abritée dans les palais des rois, peut-elle prétendre avoir rompu avec la monarchie, et par voie de conséquence, d’une forme de résignation du peuple envers ses élites ? Mais c’est un vaste débat, bien loin de la dramaturgie).
Bref : je crois au travail équipe, qu’il soit Européen (j’ai déjà cité le Théâtre du Soleil, Brook, Hergé, Jean Nouvel ou Philippe Starck), Latino-américain (je recommande à tous le magnifique « Cómo se cuenta un cuento« , transcriptions de l’atelier d’écriture de Gabriel García Marquez, et sa suite, « Me Alquilo Para Soñar »), ou Nord-Américain (le screenwriter’s podcast consacré à Michael Arndt, auteur de « Little Miss Sunshine » est formidable, il y raconte la révélation qu’a été pour lui l’arrivée chez Pixar, et la découverte de l’écriture collective, après les années de solitude. Si on me dit que l’écriture collective est impersonnelle et industrielle, je dirai que je veux bien écrire des films impersonnels et industriels comme « Montres et Cie », « Ratatouille » ou « Là-Haut »…).
Cela correspond donc pour moi à une volonté véritable de vouloir faire bouger les habitudes françaises, et ouvrir la porte à des façons d’écrire différentes (et à la fois très familières dans le cadre des séries TV, où le « show-runner » est quelque chose d’ancien déjà). Le problème n’est d’ailleurs pas tellement du côté des producteurs, pour qui cela correspond à un réel besoin, que du côté des auteurs, encore très habitués au fonctionnement isolé. Au studio, les auteurs sont largement au travail, mais nous sommes déjà en train de former les directeurs d’écriture de demain…

(illustration : « Studio 60 on Sunset Strip », par Aaron Sorkin)